ENQUETE Salaires, retraites,
sécurité de l'emploi... Les agents de l'Etat vivent sur une planète plus
confortable que les salariés du privé. La preuve en chiffres.
C'est au niveau de la progression de
salaires que l'injustice est la plus criante. Les fonctionnaires peuvent compter
sur l'accroissement des primes et indemnités: 6,4% en 2012. Ou sur la garantie
individuelle de pouvoir d'achat qui leur assure un supplément de salaire en cas
de perte de revenu par rapport à l'inflation. (Infographie
Challenges)
Avec la polémique engendrée par la suppression du jour de carence des
fonctionnaires, la guerre des deux France est relancée: le privé contre le
public. L'occasion de vérifier si les fonctionnaires (ils sont plus de 5
millions) sont des privilégiés. D'abord, contrairement à une idée reçue, ils
sont mieux payés. Sauf s'ils travaillent dans la fonction publique territoriale,
ils ont en moyenne un meilleur salaire dans une administration (Etat ou
établissements publics de santé) que les employés du secteur marchand.
Un gel des salaires en trompe-l'oeil
"L'injustice se situe surtout au niveau de la progression des salaires",
précisent Maël de Calan et Sylvain Bertoux, rapporteurs de l'étude de l'Institut Montaigne sur la dépense publique publiée
en décembre 2012. En 2010, en pleine crise, le pouvoir d'achat des
fonctionnaires avait ainsi grimpé d'1,7% ... Certes, depuis 2011, le gel du
point d'indice - base de calcul au traitement du public - a ralenti la
progression. Il n'empêche, avec le système automatique des avancements - le
"glissement vieillissement technicité", le fameux GVT -, les rémunérations
augmentent. "La moitié des agents de catégorie B a vu son salaire net progresser
au moins de 9,7% en euros constants entre 2006 et 2010, soit 2,3% par an", note
le rapport de la fonction publique de 2012.
Les fonctionnaires peuvent aussi compter sur l'accroissement des primes et
indemnités: 6,4% en 2012. Ou sur la garantie individuelle de pouvoir d'achat,
instaurée en 2007, qui assure un supplément de salaire en cas de perte de revenu
par rapport à l'inflation. Rien qu'en 2011, 74.000 fonctionnaires d'Etat ont
reçu, en moyenne, 852 euros. Coût pour le budget: 63 millions d'euros. "Depuis
2007, en euros constants, les agents de l'Etat ont été augmentés de 3%, tandis
que les salariés du privé ont perdu près de 1% de leur pouvoir d'achat", conclut
Agnès Verdier-Molinié, directrice de la fondation Ifrap.
Une flopée de petits plus
Mais le vrai avantage des fonctionnaires reste leur statut. A l'heure où le
chômage dépasse les 10%, près de 80% des agents du public sont fonctionnaires à
vie. Sauf cas rares, ils ne peuvent pas être licenciés. Sur les 20% restants, la
moitié est en CDI, donc protégée des aléas économiques. Certes, au titre de la
"solidarité" avec le privé, les agents versent, depuis 1983, une petite
cotisation chômage. Mais cette ponction, qui n'excède pas 1% de leur revenu, n'a
jamais été revalorisée. Dans le privé, cette cotisation - autour de 2,5% à la
charge du salarié est régulièrement augmentée.
Enfin, leur statut offre aux fonctionnaires toute une série de petits bonus,
en matière de logement, de mutuelle, de prêts bancaires... Sans oublier le
"supplément familial de traitement": cette prime, accordée dès le premier enfant
et cumulable avec les allocations familiales générerait une facture annuelle de
plus de 1 milliard d'euros pour l'Etat.
Un système de retraite nettement plus avantageux
Mais le plus grand privilège des fonctionnaires est leur régime de retraite,
bien plus généreux que celui du privé. Et pour cause: leur pension est calculée
sur les 6 derniers mois de traitement, celle des salariés du privé sur les 25
meilleures années. Alors que les carrières pleines dans le privé se font rares,
ce système creuse l'écart. "Les agents du public ont leur pension garantie à 75%
de leur dernier salaire en moyenne. Sauf faillite de l'Etat, ils seront toujours
payés", précise Pierre-Edouard du Cray de l'association Sauvegarde
retraites.
En revanche, dans le privé, rien n'est sûr. Il n'y a qu'à voir du côté des
retraites complémentaires, l'Agirc pour les cadres et l'Arrco pour les employés.
Pour équilibrer leurs comptes, ces régimes, gérés par les partenaires sociaux,
doivent serrer la vis, et, le 13 mars, patronat et syndicats ont désindexé les
retraites de 11,5 millions de bénéficiaires de ces caisses. Au moins les
fonctionnaires n'ont-ils pas de retraite complémentaire... Injustice réparée
depuis 2005 avec une retraite additionnelle, la RAFP, qui leur garantit un
complément de revenu - épinglée d'ailleurs par la Cour des comptes pour sa mauvaise
gestion. Résultat: à l'arrivée, le montant des retraites du public est bien
supérieur à celui du privé. Ainsi, au 31 décembre 2011, les 2,6 millions de
retraités du public ont touché une pension moyenne de 1.724 euros par mois.
Contre 1.216 euros dans le privé, selon les chiffres 2010 de l'Insee. Près de...
500 euros d'écart.
Des pensions de réversion aux petits oignons
Ce n'est pas tout. Alors que les salariés du secteur marchand prennent leur
retraite en moyenne à 62,2 ans, les fonctionnaires partent... avant 59 ans. Pis,
les catégories dites "actives", comme les policiers, pompiers, douaniers,
aiguilleurs du ciel, peuvent se retirer à partir de 52 ans. Au total, près de un
fonctionnaire sur quatre profite de "bonifications d'annuités", c'est-à-dire de
trimestres gratuits. Ces avantages tendent à diminuer. Mais les agents, bien
informés, savent en profiter à temps. Ainsi, la faculté de partir plus tôt après
quinze ans de service et trois enfants, supprimée en 2012, a été utilisée par
154.300 agents en 2011 - 12,6% de plus qu'en 2010.
Autre privilège, encore souligné par l'OCDE dans une récente étude: la
pension de réversion. Au décès d'un fonctionnaire, une partie de sa retraite est
automatiquement reversée au conjoint. Dans le privé, pour qu'un veuf ou une
veuve en bénéficie, il doit avoir au moins 55 ans, et ne pas dépasser un plafond
de ressources. Nombreuses, ces inégalités de traitement entre public et privé
ont de beaux jours devant elles. Le gouvernement a prévu de réformer à nouveau
d'ici à fin 2013 le régime général des retraites dans le privé. Pas celui du
public.
Plus de souplesse pour l'absentéisme
Même sur l'absentéisme, le décalage entre public et privé n'est pas près de
se réduire. Sous la pression des syndicats, Marylise Lebranchu, ministre de la
Fonction publique,a supprimé, en février dernier, le jour de carence des
fonctionnaires. Rayant la décision prise en 2011 par le gouvernement Fillon de
ne plus payer le premier jour d'arrêt-maladie. Dans le privé, rien n'a changé:
avant de percevoir des indemnités de la Sécurité sociale, un salarié attend
trois jours. La droite mais aussi des élus de gauche sont montés au créneau
contre la ministre, au motif que la suppression sous Fillon de ce jour de
carence avait freiné l'absentéisme de confort. De son côté, la Fédération
hospitalière de France a noté une diminution de 7% du nombre
d'arrêts-maladie.
Les agents de l'Etat abusent-ils vraiment des congés-maladie? Rien ne permet
de l'affirmer. Une étude du ministère du Travail de février 2013 montre que
l'absentéisme dans la fonction publique (3,9%) est à peine supérieur à celui des
salariés du privé en CDI depuis plus de un an (3,7%). Mais, l'enquête étant
basée sur du déclaratif, Denis Monneuse, auteur de
L'Absentéisme au travail. De l'analyse à l'action !, recommande d'être
prudent sur ses conclusions. Selon lui, l'absentéisme varie surtout selon la
catégorie socio- professionnelle : les cadres - de l'administration comme du
privé - s'arrêtent moins pour maladie que les employés ou les ouvriers, plus
exposés à des conditions de travail pénibles.
Jean-Christophe
Chanut | 05/06/2013, 18:10 - 1899
mots
La commission
d'experts chargée de livrer des recommandations sur l'avenir des retraites
commence à faire connaître ses pistes. De fait, une énième réforme se profile
pour la fin de l'année. Reste à savoir si, une fois de plus, il s'agira de
simplement bouger quelques curseurs pour boucher les trous et parvenir aux
forceps à un équilibre financier précaire. Ou bien, comme le souhaitait François
Hollande durant la campagne, si ce sera l'occasion de jeter les bases d'une
réforme systémique, en se dirigeant vers l'instauration d'un régime unique de
retraite, couvrant l'ensemble de la population active. Si, comme cela est évoqué
par la commission d'experts, le calcul de la pension de retraite des
fonctionnaires (basé sur les six derniers mois de salaire) était revu, ce serait
alors en effet un pas vers l'unification.
1993, 2003, 2008, 2010, 2013. Le
rythme des réformes des retraites s'accélère. Pourtant, le problème du
financement reste entier, puisque selon les derniers calculs du Conseil
d'orientation des retraites (COR), il manquera 20,2 milliards d'euros en 2017
et, selon les scénarios, entre 19,8 et 21,9 milliards en 2020, soit de 0,9% à 1%
du PIB. Or, l'objectif de la dernière réforme Woerth de 2010 était de ramener le
régime français des retraites à l'équilibre en 2018.
La crise ayant diminué les
perspectives de recettes, c'est raté. Il faut remettre encore une fois l'ouvrage
sur le métier. Une nouvelle réforme va donc voir le jour. Elle sera évoquée,
parmi d'autres sujets concernant l'emploi et la formation professionnelle, lors
de la deuxième grande conférence sociale des 20 et 21 juin, une fois connues les
recommandations de la commission sur l'avenir des retraites pilotée par Yannick
Moreau, l'ancienne présidente du COR. Des recommandations qui commencent à être
connues. Il se pourrait ainsi que le système de calcul de la pension de retraite
des fonctionnaires (basé sur les six derniers mois de salaire) soit reconsidéré
pour s'aligner progressivement sur ce qui est en vigueur dans le régime général
(prise en compte des 25 meilleures années).
Une réforme pour la fin de
l'année mais des recommandations dès la semaine prochaine
Suivra ensuite jusqu'à la fin de l'été
une phase de concertation avec les partenaires sociaux. Et, à l'automne, le
gouvernement fera connaître ses choix, en présentant un projet de loi qui risque
de jeter à nouveau les salariés dans les rues. Mardi 29 mai, la Commission de
Bruxelles a mis un coup de pression sur la France, en demandant explicitement
que cette réforme soit votée cette année et rétablisse l'équilibre à l'horizon
2020. Reste à savoir comment... On sait déjà que François Hollande est favorable
à un nouvel allongement de la durée de cotisation qui pourrait passer de 41,5
années actuellement à 43 voire 44 années, comme le demande le Medef. Sont
également évoquées : une augmentation de la CSG de 6,6 à 7,5% sur les pensions,
une désindexation partielle des pensions par rapport à l'évolution de
l'inflation, la remise en cause de certains avantages liés aux familles
nombreuses, etc. Bref, des mesures techniques et financières destinées à
rapidement boucher les trous, mais aucune disposition structurelle. Les débats
risquent encore une fois de se cristalliser autour de la question difficile de
la prise en compte de la pénibilité, écartée en 2010 par Nicolas Sarkozy, alors
que la gauche manifestait en ce sens.
Le vieux mythe du régime
unique revigoré
Pourtant, durant sa campagne
électorale, le candidat François Hollande avait évoqué une « réforme systémique
» des retraites, beaucoup plus ambitieuse. Il était soutenu sur ce point par la
CFDT, qui milite aussi fortement pour des modifications d'ampleur, plutôt que
pour la énième « réformette » qui se contenterait de faire bouger quelques
paramètres financiers pour équilibrer les régimes.
D'ailleurs, et c'est un peu oublié, la
loi portant réforme des retraites du 9 novembre 2010 prévoyait dans son article
16 « qu'à compter du premier semestre 2013, le comité de pilotage des régimes de
retraite organise une réflexion nationale sur les objectifs et les
caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge du risque
vieillesse. Parmi les thèmes de cette réflexion, figurent [...] les conditions
de mise en place d'un régime universel par points ou en comptes notionnels, dans
le respect du principe de répartition ».
De fait, l'idée est en effet d'aller
vers un régime de base unique pour l'ensemble des salariés, du public comme du
privé, à l'instar de ce qui existe déjà dans des pays comme le Canada, les
États-Unis, les Pays-Bas, le Royaume-Uni ou la Suède. « C'est un mouvement
historique. Je crois que l'on y va mais très doucement », estime Jean-Louis
Malys, secrétaire national de la CFDT en charge des retraites.
Cette idée, d'ailleurs, n'est pas
nouvelle. Le programme du Conseil national de la résistance la prévoyait. Mais,
en 1945, elle n'a pu être réalisée, certains régimes spéciaux voulant
sauvegarder leur indépendance ayant refusé une intégration dans un régime
généralisé (agriculteurs, indépendants, etc.). Résultat, coexistent actuellement
en France plus de 30 régimes de retraite de base.
Le régime unique aurait pour
principale qualité de mettre fin aux inégalités de traitement face à la
retraite. Des inégalités de plus en plus dénoncées par les salariés affiliés au
régime général au fur et à mesure que les règles régissant les retraites se
durcissent (surtout depuis la réforme Balladur de 1993) en raison du
déséquilibre démographique (selon le COR, de 2,1 cotisants par retraité en 2010,
le ratio démographique devrait passer à 1,65 cotisant par retraité en 2020 et à
1,4 en 2040) et donc des difficultés de financement. François Hollande a
d'ailleurs explicitement évoqué ces inégalités entre régimes lors de sa
conférence de presse du 16 mai dernier. Sans s'engager plus avant sur la façon
de les résoudre.
Des avancées vers l'égalité
privé-public
Ce mouvement vers l'unification, on en
perçoit déjà quelques prémices. Au niveau institutionnel, d'abord, avec un
mouvement de rapprochement de diverses caisses. Ainsi la création en 2006 du
Régime social des indépendants (RSI), né de la fusion de la Cancava (artisans)
et de l'Organic (industriels et commerçants). Les régimes des professions
libérales également, unifiés et gérés depuis 2004 par la Caisse nationale
d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL). Sans parler, pour les
régimes complémentaires, cette fois, de l'union de plus en plus étroite entre
l'Arrco (salariés) et l'Agirc (cadres).
Mais cette marche vers un régime
unique, on la retrouve également dans les règles régissant les différents
régimes. Ainsi, ce n'est peut-être pas assez dit, mais depuis la réforme de
2003, le régime de base de retraite des fonctionnaires a perdu de son attrait :
alignement de la durée d'assurance requise pour bénéficier du taux plein sur
celle applicable dans le régime général, indexation des pensions sur l'indice
des prix hors tabac.
Un mouvement qui s'est poursuivi après
la réforme Woerth de 2010 : report progressif de l'âge de la retraite (60 à 62
ans pour les sédentaires), suppression du dispositif de départ anticipé pour les
parents de trois enfants après quinze ans de carrière.
Mais il reste tout de même une grande
différence, celle qui énerve le plus les salariés du privé : les pensions des
fonctionnaires sont toujours calculées sur la base du traitement de référence
des six derniers mois, hors prime, au lieu de la prise en compte des 25
meilleures années dans le privé, depuis la réforme Balladur de 1993 (auparavant,
le calcul s'effectuait sur la base des 10 meilleures années). La commission
Moreau, on le sait déjà, suggère, avec prudence, de remettre en cause
progressivement ce mode de calcul.
Même les régimes spéciaux (SNCF, RATP,
etc.) ont commencé doucement à évoluer depuis la réforme de 2008 : recul
progressif de l'âge de la retraite (mais selon un calendrier particulier, il est
vrai), introduction d'un mécanisme de surcote et de décote, etc.
Vers un régime à la
carte et par points
La marche vers une égalisation
des régimes de retraite est donc encore un long chemin. Pour preuve,
toujours selon le COR, la pension moyenne des fonctionnaires atteindra
27000 euros en 2050, alors que celle des cadres du privé plafonnera à
22500 euros et celle des retraités non-cadres à 14152 euros. Mieux, les
pensions moyennes des régimes spéciaux de la SNCF et d'EDF-GDF
atteindraient 40000 euros par an en 2050. Alors, pour réduire ces
inégalités, comment parvenir à ce mythique régime unique ?
L'hypothèse la plus généralement
retenue est l'institution d'un régime par répartition fonctionnant à la
carte et par points. C'est, en tout cas, le dispositif proposé par des
économistes classés à droite comme à gauche.
Ainsi, l'Institut Montaigne,
d'obédience plutôt libérale, plaide dans une note de juin 2010 - «
Réformer les retraites : pourquoi et comment » - pour l'instauration d'un
régime unique remplaçant les régimes obligatoires et complémentaires
actuels. Ce régime unique, détaille la note, « rétablirait l'égalité, à
condition que toute contribution se traduise par l'obtention de points
dans le respect du principe "à contributions égales, droits égaux", ce qui
n'est pas le cas aujourd'hui ».
La notion d'âge légal de départ
à la retraite serait supprimée et remplacée par celle de « plage légale »
(par exemple à partir de 55 ans et jusqu'à 70 ans). Chaque bénéficiaire
serait ainsi en mesure de décider librement du moment où il se retire en
liquidant tout ou partie de sa pension. Bien entendu, ce principe devrait
respecter la neutralité actuarielle.
Concrètement, explique
l'Institut Montaigne, si l'on part plus tôt, on touche moins mais plus
longtemps. Ainsi, en attribuant un coefficient 1 à la pension mensuelle
due à 60 ans, et un coefficient 1,25 en cas de départ à 65 ans, « on offre
la liberté de choix aux assurés sociaux sans que cela pose des problèmes à
la Caisse de retraite : ceux qui préfèrent partir tôt en ayant moins
chaque mois le font ; ceux qui préfèrent partir plus tard pour disposer de
plus d'argent chaque mois le font. Les choix individuels ne perturbent pas
l'équilibre financier du système de retraite ».
En outre, ce système devrait
obéir à certaines règles pour ne pas connaître de déséquilibres : adopter
le principe des cotisations définies ; ne distribuer aux retraités que ce
qui provient des cotisations prélevées sur les actifs, « à un taux
raisonnable » ; s'interdire de recourir à l'emprunt.
C'est un « big bang » assez
semblable que proposent les économistes Antoine Bozio et Thomas Piketty
dans leur ouvrage Pour un nouveau système de retraite (éditions Rue d'Ulm,
2008). Eux aussi, à la multiplicité des caisses et régimes actuels,
opposent l'instauration d'un système unique où chaque individu
accumulerait des points de retraite durant sa vie professionnelle. Ces
points seraient porteurs d'un intérêt réel indexé sur l'évolution de la
masse salariale. Chacun déciderait de sa date de départ à la retraite : il
n'y aurait plus d'âge légal. Et la pension serait alors calculée en
fonction du nombre de points accumulés et de l'espérance de vie moyenne à
l'âge choisi pour se retirer de la vie active. Les avantages non
contributifs (ceux versés sans rapport avec les cotisations) seraient
financés par l'État ou d'autres prélèvements spécifiques.
Quel part du PIB
affecter aux retraités ?
La nouvelle réforme des
retraites qui se profile jettera-t-elle les bases d'un tel régime unique
qui réduirait les inégalités ? C'est encore difficile à prédire, et ce
sera l'un des objets de la concertation que d'en débattre. Mais, même
après son éventuelle instauration, sachant que les modalités de la période
de transition sont extrêmement difficiles à régler, un régime unique par
point ne résoudrait pas la question du financement du déficit
démographique. Il resterait alors une question épineuse à régler pour
déterminer le montant des cotisations, de la valeur du point et des
pensions : quelle part du PIB les Français seraient-ils prêts à affecter à
ce nouveau régime ?
Actuellement, déjà, le coût des
retraites représente 13 % du PIB. Sans les multiples réformes intervenues
depuis 1993, il atteindrait 18 %. Et l'un des enjeux principaux de la
réforme Hollande sera de définir le bon équilibre pour financer les
retraites sans trop peser sur la compétitivité des entreprises, qui
refusent d'ores et déjà toute hausse de cotisations. Or, cette hausse est
réclamée par certains syndicats, notamment la CGT. Elle l'a obtenue en
partie pour la réforme des retraites complémentaires adoptée par les
partenaires sociaux, qui prévoit une hausse des cotisations patronales et
salariales à compter du 1er janvier 2014.
Jean-Christophe
Chanut | 06/06/2013, 15:17 - 877
mots
Bien que réformé en
2010, le régime de retraite des parlementaires reste très avantageux. A
l'Assemblée, le fameux et très décrié système de la "double cotisation" a
quasiment disparu depuis trois ans. Mais les nouvelles règles restent
attractives puisqu'elles permettent à un député, après un premier mandat de cinq
ans, de pouvoir percevoir une pension égale à 1.200 euros mensuels. Au Sénat, la
double cotisation n'existe plus également. Mais un très avantageux système
complémentaire par points et un régime de base fonctionnant en partie en
capitalisation permet à un sénateur de percevoir une pension moyenne de 4.382
euros.
C'est l'un des sujets favoris au Café
du Commerce : le régime de retraite des parlementaires. Mythe, fantasme... Il se
raconte beaucoup de choses (parfois fausses) sur ce régime il est vrai hyper
spécial. Alors que se profile bientôt une nouvelle réforme des retraites et que
la tendance est à l'alignement des conditions de départ à la retraite, quel que
soit le régime, il est intéressant de se pencher sur la réalité du régime des
parlementaires français.
Assemblée nationale, la double
cotisation supprimée... ou presque
La caisse de pensions des députés,
créée par une résolution de la Chambre des députés du 23 décembre 1904, est
alimentée par une cotisation prélevée sur l'indemnité parlementaire et par une
subvention inscrite au budget de l'Assemblée. Ce régime a connu plusieurs
évolutions. La dernière réforme date du 3 novembre 2010 : le Bureau de
l'Assemblée nationale a alors pris plusieurs décisions tendant à aligner le
système des pensions sur celui de la fonction publique et à mettre fin à
certaines particularités, notamment, et c'est peu connu, au fameux régime de la
« double cotisation » qui a fait beaucoup jaser.
Jusqu'en novembre 2010, les députés
pouvaient cotiser doublement à leur caisse de retraite lors des trois premiers
mandats (de 5 ans), puis 1,5 fois sur le suivant. Cela permettait donc au
parlementaire de cotiser 22,5 ans pour une retraite complète, contre plus de 40
ans aujourd'hui pour un salarié « ordinaire ». Ce système permettait à un député
de toucher une allocation vieillesse de 1.500 euros net pour cinq ans de mandat
et de... 6.000 euros après 20 ans de mandat. Depuis novembre 2010, ce dispositif
de double cotisation a disparu... ou presque. Désormais, les députés peuvent
(c'est facultatif) cotiser « que » 1,5 fois sur les deux premiers mandats, 1,33
sur le suivant, puis 1,25 sur ceux d'après. Cette réforme a fait baisser la
pension de 30%. Il n'en reste pas moins qu'un député est encore assuré de
toucher une pension de près de 1.200 euros après un premier mandat de cinq
ans.... Soit un montant quasi équivalent à celui de la pension médiane touchée
par les Français (environ 1.300 euros) après une carrière complète.
En revanche, il faut reconnaître que
la réforme de 2010 s'aligne totalement sur le régime général pour ce qui est de
l'âge légal de départ à la retraite (qui passe de 60 à 62 ans), le taux de
cotisation (qui passera de 7,85% à 10,55%, soit le taux de cotisation actuel du
secteur privé, d'ici à 2020), et le nombre d'annuités requises (progressivement
porté à 41,5 annuités pour une retraite à taux plein). A noter aussi, avantage
non négligeable, que les députés ne sont pas soumis à un dispositif de décote en
cas d'année manquante : la pension est calculée au prorata du nombre d'années
effectuées. Alors que dans le privé, la pension sera amputée d'une décote de 5%
par année manquante (dans la limite de 5 ans).
Le Sénat et sa pension moyenne
de 4.382 euros
La Caisse des Retraites des Anciens
Sénateurs est née d'une résolution votée par le Sénat le 28 janvier 1905. Le
droit à pension des membres du Parlement est destiné à pallier la rupture subie
dans leur carrière professionnelle du fait de leur élection, et à leur garantir
un revenu de retraite.
Lors de sa réunion du 15 décembre
2010, le Bureau du Sénat a décidé d'harmoniser les règles applicables aux
Sénateurs avec celles de droit commun, conformément à la loi du 9 novembre 2010
portant sur la réforme des retraites. Comme à l'Assemblée nationale, l'âge
possible du départ à la retraite remonte donc progressivement de 60 à 62 ans et
la durée de cotisation s'élèvera aussi par étape pour atteindre 41 ans et six
mois à compter du 1er janvier 2015 (comme dans le régime général). En revanche,
l'ancien système de « cotisations doubles » a été totalement supprimé. Il est
replacé par un très intéressant régime de retraite complémentaire par points.
Ainsi la pension mensuelle moyenne nette de retraite d'un Sénateur, hors
majoration pour enfants, était au 1er avril 2013 de... 4.382 €. Un mandat de
sénateur de six ans offre une pension mensuelle de 1.932 euros ; deux mandats,
3.096 euro. Ainsi la pension mensuelle moyenne nette de retraite d'un Sénateur,
hors majoration pour enfants, était au 1er avril 2013 de... 4.382 €. A noter que
le "régime de base" de retraite des snateurs fonctionne en partie par
capitalisation. Les cotisations ne couvant que 43% des dépenses, le reste est
donc financé par les intérêts des placements effectués par le Sénat. En 2009, la
trésorerie affichait un excédent de... 581 millions d'euros.
Bref, qu'il s'agisse des députés ou
des sénateurs, des réformes sont progressivement menées pour aligner leurs
conditions de départ à la retraite sur celles du régime général. Mais il reste
tout de même encore de très avantageuses dispositions particulières. Au
Parlement, on justifie ces « avantages » par le fait que les régimes des députés
et des sénateurs sont totalement autonomes. En d'autres termes, un parlementaire
qui part à la retraite et qui a exercé une profession avant (ou après) son ou
ses mandat(s), n'a pas le droit d'évoquer les années où il était député ou
sénateur pour sa reconstitution de carrière.
Jean-Christophe
Chanut | 10/06/2013, 17:35 - 950
mots
Les régimes spéciaux
de retraite si décriés seront-ils concernés par la future réforme ? Les régimes
de la SNCF et de la RATP, réformés en 2008, continuent, au grand dam de
certains, d'être particulièrement avantageux : possibilités de départs
anticipés, un calcul de la pension basé sur les six derniers mois de salaire,
etc. Problème, en raison d'un ratio démographique défavorable, ils sont
déficitaires, obligeant l'Etat à leur verser une subvention d'équilibre qui
s'élèvera à 4 milliards d'euros en 2013.
« Ils » déchainent les passions ; « ils » sont montrés du doigt ; « ils »
sont voués aux gémonies. « Ils », ce sont les nombreux régimes spéciaux de
retraite qui concernent tant les salariés de la SNCF, de la RATP, que ceux des
entreprises électriques et gazières. Mais aussi l'Opéra de Paris, la
Comédie-Française ou encore... les clercs et employés de notaires. Seront-ils
concernés par la future réforme des retraites ? La question est sensible et la
réponse...explosive. La
ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, a déjà précisé dimanche 9 juin
que tout le monde devra faire des efforts. Et la ministre délégué aux
Personnes âgées, Michèle Delaunay, est allée dans le même sens ce lundi 10 juin.
Mais, politiquement, le terrain est miné. Les syndicats ont en effet déjà
fait savoir qu'ils seraient prêts à descendre dans la rue si le gouvernement
touchait au calcul des pensions dans la fonction publique et aux régimes
spéciaux. Il faudra attendre vendredi 14 juin et les recommandations de la
commission d'experts présidée par Yannick Moreau, pour savoir qui sera
réellement concerné. En attendant, quelques précisions sur les régimes spéciaux
de la SNCF et de la RATP.
Quelques convergences avec le régime général...
La gestion des pensions de retraite des agents de la RATP relève, depuis le
1er janvier 2006, de la caisse de retraites du personnel de la RATP (CRPRATP).
Celle du régime spécial de retraite de la SNCF est assurée, depuis le 30 juin
2007, par la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF
(CPRPSNCF). Dans les deux cas, ce n'est pas très connu, ces caisses constituent
des organismes de sécurité sociale de droit privé, distincts de l'entreprise, et
dotés d'une personnalité morale.
Dans le cadre de la réforme des régimes spéciaux de retraite adoptée en 2008,
les régimes de la SNCF et de la RATP se sont vu appliquer par décret les
principes de la réforme mise en œuvre à compter de 2003 dans la fonction
publique (hausse de la durée d'assurance requise pour un départ à la retraite au
taux plein, instauration de barèmes de décote et de surcote et indexation du
montant des pensions sur l'évolution des prix et non plus sur les traitements).
Mais selon un calendrier spécifique : la plupart des mesures seront pleinement
applicables qu'à compter de 2017. Ainsi, la durée de cotisation pour obtenir une
retraite à taux plein, passera progressivement de 37,5 à 41,5 années (166
trimestres) à l'horizon 2017.
... mais encore de grandes différences sur le calcul de la pension et
son montant
Il en va de même pour le taux de cotisation des salariés. Avant la réforme de
2008, ce taux était de 7,85% à la SNCF, il sera progressivement porté à 8,12% en
2017 et à 10,55% (soit le taux actuel pour le régime général)... en 2026. Pour
la RATP, ce taux est déjà de 12%. Quant à l'âgé légal minimum pour partir à la
retraite, il a aussi été relevé de deux ans, mais simplement à compter de...
2017.
Cette année là, les « roulants » (nés à compter de 1972) des deux entreprises
pourront partir à la retraite à 52 ans (au lieu de 50 ans). Pour les autres
personnels (nés à compter de 1967), l'âge minimum sera porté de 55 à 57 ans....
En 2011, selon Conseil d'orientation des retraites (COR) , l'âge moyen de la
retraite atteignait 54,4 ans à la RATP et 55,1 ans à la SNCF. A comparer à l'âge
de 62 ans, en moyenne, enregistré dans le régime général.
A noter aussi que, comme dans la fonction publique, le calcul du montant de
la pension est basé sur les six derniers mois de rémunération (contre la moyenne
des 25 meilleures années dans le privé). Résultat, toujours selon le COR, alors
que la pension des cadres du privé plafonnera à 22.500 euros en 2050 (14.152
pour les non-cadres), elle atteindrait 40.000 euros à la SNCF et entre 28.000 et
31.000 à la RATP. Un écart qui s'explique aussi par le fait que, pour faire
accepter aux agents la réforme de 2008, ils ont bénéficié d'échelons
d'ancienneté supplémentaires dans la grille des salaires et de majoration des
traitements en fin de carrière, ce qui a eu pour conséquence d'augmenter le
salaire de référence pour le calcul de la retraite.
Des régimes déficitaires soutenus par l'Etat
Des régimes spéciaux qui demeurent intéressants pour leurs bénéficiaires
donc, même si, sur certain points, la convergence avec le régime général est en
cours. Mais, c'est aussi la situation financière de ces régimes qui est souvent
dénoncée, obligeant à une intervention de l'Etat. A la SNCF, au total, les
cotisations (1,88 milliard d'euros en 2011) couvrent environ 36 % des charges de
pensions (5,15 milliards d'euros en 2011), le ratio cotisants/retraités étant
devenu inférieur à 56 % en 2010.
Il y a environ 160.000 cheminots actifs pour 280.000 retraités. A la RATP, en
2011, le produit des cotisations sociales (434 millions d'euros) couvrait
environ 46 % des charges de prestations vieillesse (937 millions d'euros), le
ratio cotisants/retraités s'établissant à 91 %. Environ 43.600 agents
travaillent à la Régie pour 48.000 retraités. Et, compte tenu de la dégradation
continue de leurs ratios démographiques, les deux régimes ont bénéficié en 2012
d'une subvention d'équilibre de l'Etat en hausse de 5,3 % pour le régime de la
SNCF (3,36 milliards d'euros) et de 4,9 % pour le régime de la RATP (552
millions d'euros) par rapport à 2011. En 2013, les subventions d'équilibre
seront respectivement de 3,4 milliards d'euros et de 614,6 millions d'euros.
C'est cet appel à l'Etat en comblement de financement des déficits de ces
régimes spéciaux qui « passe » de moins en moins bien en cette période de
disette.
Un agent de la fonction publique d'Etat gagne en moyenne 330
euros de plus que dans le privé. Mais ces chiffres cachent de nombreuses
disparités. Et la comparaison n'est pas vraiment pertinente. Explications.
Salaires nets mensuels par catégorie socioprofessionnelle dans
les trois fonctions publiques et dans le scteur privé (en euro, en 2010, en
équivalents temps pleins)
Rapport sur l'état de la fonction publique et les
rémunérations, PLF 2013
Rarement l'un de nos sujets n'a suscité autant de commentaires: plus d'une
centaine de lecteurs ont réagi à l'article "Quels
sont les fonctionnaires les mieux payés?" La tonalité est la même: des
témoignages de fonctionnaires qui contestent le chiffre d'un salaire moyen de
2500 euros par mois. "Je suis fonctionnaire catégorie B, 12 ans d'ancienneté, et
je gagne 1500 euros net", témoigne Lola42. "Pour ma part, avec
17 ans d'ancienneté, je gagne 1650€/mois toutes primes incluses", renchérit
Karinep. "J'ai été fonctionnaire dans un hôpital pendant 42,5
ans. J'ai débuté sténodactylo et j'ai terminé secrétaire médicale, j'ai terminé
ma carrière fin 2008 avec 1750 euros alors vous voyez, loin du compte des plus
de 2000 euros!", s'énerve Mandoline.
Tous les
fonctionnaires gagnent-ils 2500 euros par mois?
Non. 2459 euros, c'est le salaire net moyen perçu en 2010 par un
fonctionnaire de l'Etat. Le salaire médian (la moitié gagne moins, l'autre
moitié plus) est de 2254 euros nets par mois. L'Etat emploie 44% du total des
5,23 millions de fonctionnaires, soit 2,3 millions de personnes. Ce sont les
mieux lotis en termes de rémunérations. Leurs collègues de la fonction publique
territoriale (1,8 million d'agents), ont perçu en moyenne, en 2010, 1800 euros
nets par mois, avec un salaire net médian de 1616 euros. Les agents de la
fonction publique hospitalière, au nombre de 1,1 million, gagnent eux en moyenne
2205 euros nets par mois, avec un salaire médian de 1883 euros.
Comment expliquer ces disparités entre les différentes
catégories de fonctionnaires?
Il s'agit principalement d'effets de structure cumulés: il y a davantage de
cadres dans la fonction publique de l'Etat (FPE) et la fonction publique
hospitalière (FPH) que dans la fonction publique territoriale (FPT); davantage
d'employés et ouvriers dans la FPT que dans les établissements publics de santé
et davantage d'agents à temps partiel dans la territoriale et l'hospitalière.
Ainsi, le poids des non-titulaires (agents employés par la fonction publique
mais qui n'ont pas le statut de fonctionnaires), qui représentaient 17% de
l'emploi public au 31 décembre 201, est de 19,4% dans la territoriale contre
16,5% dans l'hospitalière et 15,7% dans la FPE.
Or ces contractuels sont majoritairement rémunérés à un niveau proche du
Smic. Par ailleurs, les agents de catégorie A (l'équivalent des cadres)
représentent 50% des effectifs de la fonction publique d'Etat (23,5% hors
enseignants), contre 8,7% seulement dans la fonction publique territoriale et
18% dans l'hospitalière. Les fonctionnaires de catégorie C (l'équivalent des
ouvriers et employés) sont à l'inverse majoritaires dans la FPT (76%),
représentent la moitié (49,5%) des effectifs de la FPH et moins d'un quart (23%)
de la FPE.
Quelle comparaison avec le
privé?
A priori, il n'y a pas photo: les fonctionnaires sont mieux payés que les
salariés du privé, où le salaire mensuel
net moyen s'élevait, en 2010, à 2082 euros. Le salaire médian, qui sépare la
population des salariés en deux parties égales, était lui 1675 euros. Donc oui,
les fonctionnaires gagnent mieux leur vie que les salariés du privé, mais les
fonctionnaires d'Etat seulement. Les agents de la fonction publique hospitalière
ont un salaire légèrement supérieur, mais ceux de la fonction publique
territoriale gagnent moins que les salariés du privé.
Comment expliquer ces différences entre public et
privé?
Tout d'abord, parce que le minimum de traitement dans la fonction publique
est légèrement plus élevé que le Smic: 1181 euros nets mensuels contre 1118
euros. Ensuite, et surtout, parce qu'il y a davantage de cadres dans la fonction
publique que dans le secteur privé et que les salariés sont plus âgés dans la
fonction publique que dans le privé, dont leur niveau de rémunération est plus
élevé. Globalement, le secteur public propose par rapport au privé des salaires
plus élevés pour les catégories les moins diplômées (ouvriers et employés), la
fonction publique territoriale offrant néanmoins des niveaux de salaires
relativement proches du secteur privé pour ces catégories.
Par exemple, un employé dans la FPE gagne 2021 euros nets par mois, contre
1588 euros pour un employé dans la FPH et 1547 euros dans le privé. En revanche,
les cadres dans la fonction publique gagnent moins que dans le privé: 2977 euros
dans la FPE, 3174 euros dans la FPT, 3520 euros dans la FPH et 3950 euros dans
le privé. Seuls les médecins des établissements publics gagnent plus (4702
euros). Enfin, en termes de distribution, les salaires nets sont moins dispersés
dans la fonction publique que dans le secteur privé: l'écart entre le haut et le
bas de la distribution est compris entre 2 pour la fonction publique
territoriale et 2,3 pour la fonction publique hospitalière ; il atteint 2,9 dans
le secteur privé.
Jean-Christophe
Chanut | 05/06/2013, 13:34 - 1003 mots
Le groupe d'experts
sur les retraites, qui doit remettre dans une dizaine de jours ses
recommandations, a évoqué avec les syndicats la possibilité de remettre en cause
la règle des six derniers mois de salaire pour le calcul de la pension des
fonctionnaires. A part cette différence, importante il est vrai, le régime de
retraite des fonctionnaires a déjà été progressivement aligné sur celui du
régime général.
Avec une très grande
prudence, tant le sujet est explosif, la commission d'experts sur la réforme des
retraites, présidée par la conseillère d'Etat Yannick Moreaux, évoque une
réforme du « régime » de retraite des fonctionnaires. Le sujet a en tout cas été
évoqué, lors de l'audition de syndicalistes. On le sait, la grande différence
entre le régime général et les retraites des fonctionnaires réside dans le fait
que, pour ces derniers, la pension des agents est calculée sur les 6 derniers
mois de salaire (hors primes), contre la moyenne des 25 meilleures années dans
le régime général. C'est quasiment la dernière différence, certes de taille,
entre les deux systèmes. Car, c'est peu connu, mais depuis 2003,
progressivement, les modalités de départ à la retraite des fonctionnaires sont
alignées sur celles en vigueur dans le privé. Tour d'horizon.
Des statuts
différents
D'abord il convient immédiatement de
faire une distinction. En effet, il existe les agents titularisés de la fonction
publique qui relèvent du Code des pensions civiles et militaires, et dont la
retraite est versée soit directement par l'Etat pour les fonctionnaires d'Etat,
civils et militaires, soit par la Caisse nationale de retraite des agents des
collectivités territoriales (CNRACL) pour les agents des collectivités locales
et de la fonction publique hospitalière. La deuxième catégorie, les salariés non
titulaires de la fonction publique, eux, dépendent du régime général des
salariés pour la retraite de base, et de l'Ircantec (Institution de retraite
complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités
publiques) pour la retraite complémentaire. Les régimes des fonctionnaires sont
alimentés par une cotisation salariale et une cotisation « employeur », à la
charge de l'Etat. La cotisation « salariée » s'élevait à 7,85% jusqu'à 2010.
Elle sera progressivement alignée sur le niveau de cotisation des salariés du
régime général, à savoir 10,55%. Depuis 2011, le taux de cotisation augmente
donc de 0,27% chaque année, pour atteindre 10,55% en 2020.
L'âge de départ identique dans
le privé et le public sauf pour les catégories « actives »
S'agissant de l'âge de départ à la
retraite, là aussi les choses ont bougé. Il existe deux catégories d'emploi dans
la fonction publique : la catégorie « sédentaire » (même règles que dans le
privé) et la catégorie « active ». La seconde correspond à des emplois
considérés comme pénibles ou risqués (police, militaire, etc.). Si l'agent a
effectué moins de 17 ans de services en catégorie active, l'âge de départ est le
même que dans le régime général, à savoir 62 ans si il est né en 1955 ou après,
ou entre 60 et 62 ans si il est né avant cette date. Si l'agent a effectué au
moins 17 ans de services en catégorie active, il peut partir à la retraite avant
l'âge du régime général, la plupart du temps 5 ans plus tôt, parfois 10 (soit
respectivement à 57 ans et 52 ans à partir de 2017). En 2009, un peu moins du
quart des fonctionnaires civils partant à la retraite ont pu le faire de façon
anticipée au bénéfice de leur carrière en catégorie active. Pour l'essentiel, il
s'agissait de départ à 55 ans (5 ans d'anticipation), le départ à 50 ans (10 ans
d'anticipation) ne concernant que 1,4% des agents. A noter également que depuis
2010, le dispositif de départ anticipé pour les fonctionnaires parents de trois
enfants après 15 ans de carrière a été supprimé.
La durée de
cotisation alignée sur les règles du privé
Par ailleurs, concernant la durée de
cotisation et l'âge requis, depuis la réforme Fillon de 2003, les conditions
pour percevoir sa retraite à taux plein dans la fonction publique ont été
alignées progressivement sur celles du régime général. La transition n'est
cependant pas tout à fait achevée (l'âge requis progresse de quelques mois
chaque année) : l'âge auquel l'agent peut percevoir sa retraite à taux plein
sans condition de durée de cotisation sera le même que dans le régime général en
2020, à savoir, pour l'instant, 67 ans, alors qu'il était de 62 ans et 9 mois en
2011. Pour 2013, il se situe à 64 ans. Le fonctionnaire doit aussi justifier
d'une durée de cotisation (tous régimes confondus) comprise entre 160 et166
trimestres suivant l'année de naissance. Cette durée est de 163 trimestres pour
les fonctionnaires nés en 1951, 164 pour la génération 1952, 165 pour les
générations 1953 et 1954 et 166 trimestres pour la génération 1955. Cette durée
a vocation à évoluer encore dans les années à venir, au même rythme que dans le
régime général.
La règle des six dernier
mois : objet de la polémique
Quant au montant de la pension à taux
plein (il y a aussi un système de décote et de surcote comme dans le privé), le
sujet qui fait polémique, il s'élève à 75% du traitement perçu les six derniers
mois, hors primes (sauf exceptions, comme l'indemnité de sujétions spéciales
dans la police nationale). Il faut avoir perçu le même traitement, au titre du
même emploi, grade, classe et échelon, pendant les six derniers mois (pour
éviter les promotions du dernier instant). A défaut, c'est le traitement perçu
antérieurement qui fait référence. Historiquement, la règle retenue des six
derniers mois s'expliquait par la volonté de compenser des évolutions de
carrière (et donc de rémunération) parfois quasi inexistante, notamment pour la
plus basse catégorie de fonctionnaires (la « C »).
Autre motif : quand l'on devenait
fonctionnaire, cela garantissait aussi un montant de pension de retraite «
décent ». Le tout à l'époque des « 30 Glorieuses » quand la fonction publique
avait du mal à attirer des salariés à l'inverse du privé où les évolutions de
carrière et de rémunération étaient constantes. Mais, maintenant que la
progression salariale est nettement plus modérée, cette différence choque. Pour
autant, les syndicats de fonctionnaires évoquent déjà un casus belli, si le
gouvernement revient sur la règle des six derniers mois. Prudemment, le groupe
des experts sur la retraite évoque l'idée de porter la période de référence de 6
mois actuellement à 3 ans. A suivre...
Toujours nantis, mais bien moins qu'avant.
Les retraités de la fonction publique demeurent une catégorie bien à
part.
Surtout s'ils ont liquidé leur pension avant
2003. Car c'est sous le gouvernement Raffarin il y a dix ans que la donne a
changé. Avant la réforme Fillon, les différences en matière de retraite entre les
salariés du public et du privé étaient flagrantes. Tout opposait les deux
catégories, à l'avantage des agents de l'État: âge de départ, durée et taux de
cotisation, base de calcul de la pension, décote par années manquantes, taux de
liquidation…
Les choses ont évolué et la plupart des différences ont été gommées lors des
réformes votées en 2003 et 2010. Dans quelques années, salariés du privé et du
public cotiseront au même taux (10,55 %) et pendant la même durée (166
trimestres), partiront au même âge (sauf pour les «actifs» - policiers,
militaires… -, qui bénéficient toujours, comme dans les régimes spéciaux, d'un
bonus de 5 à 10 ans après 25 années de service), auront le même taux de décote
par annuité manquante (1,25 %)… Seule perdure la différence de base de calcul
des pensions: sur les 25 meilleures années pour un salarié du privé et les 6
derniers mois de traitement pour un fonctionnaire. Cet héritage de l'histoire
n'a jamais été remis en cause. François Fillon a bien essayé de le faire en 2003
- il aurait aimé dans un premier temps passer à 10 ans de base de calcul -, mais
il s'est heurté au puissant lobby des syndicats de la fonction publique et a
capitulé pour ne pas perdre tout le bénéfice de sa réforme. Même conclusion
lorsque Nicolas Sarkozy a augmenté en 2010 de deux ans l'âge de départ pour
bénéficier d'une retraite à taux plein.
Régime par capitalisation
Cette petite différence est un gros avantage. Alors qu'un salarié du privé
voit le niveau de sa retraite calculée sur les deux tiers de sa carrière, son
homologue de l'État ne voit pris en compte que ses six derniers mois de
traitement, au cours desquels il a bénéficié d'une promotion et d'une hausse de
salaire. Résultat, un ex-fonctionnaire de l'État touche en moyenne une pension
de 1716 euros par mois, contre 1216 pour son homologue du privé.
De plus, le fonctionnaire a pu (et peut toujours) cotiser à la Prefon, un
régime par capitalisation qui gère 10,5 milliards d'euros d'actifs pour 103.000
allocataires. Mais ce système avantageux a été si mal géré que les assureurs
privés ont été obligés de renflouer ses caisses de plusieurs centaines de
millions pour garantir le niveau de ses rentes… Dans le privé, un tel fiasco
aurait conduit à la liquidation pure et simple du régime.
INFO LE FIGARO - Révolutionner les règles de
calcul de la retraite des fonctionnaires, augmenter les charges patronales,
imposer davantage les retraités… Le rapport de la commission Moreau sur l'avenir
des retraites, qui sera remis la semaine prochaine au gouvernement, propose une
série de mesures détonantes.
Après la douloureuse réforme de la famille, celle des retraites. Le
rapport commandé sur le sujet par Jean-Marc Ayrault à Yannick Moreau est sur le
point d'être bouclé. Augmenter les cotisations patronales, aligner le taux de
CSG des retraités sur celui des actifs, revoir les règles de calcul des pensions
des fonctionnaires… Le rapport de l'ex-présidente du Conseil d'orientation des
retraites (COR), qui
sera remis la semaine prochaine au gouvernement, contiendra des propositions
détonantes.
D'après des sources syndicales qui ont eu accès à son contenu, le rapport
propose une série de mesures qui mettraient à contribution tous les Français
pour redresser les comptes à court terme. Les retraités d'abord, via la
suppression de l'exonération d'impôt de 10% pour frais professionnels dont ils
bénéficient comme les salariés de manière injustifiée, la fiscalisation des
pensions majorées de 10% pour les parents de trois enfants et plus, ou encore
l'alignement du taux réduit de CSG des retraités aisés sur celui des actifs.
Attention, ces mesures que rapporte Yannick Moreau ne seraient pas forcément
cumulatives.
Les actifs seraient eux aussi mis à contribution en travaillant plus. Si
Yannick Moreau ne tranche pas entre report de l'âge légal de retraite et allongement de la durée
de cotisation pour prétendre à une retraite à taux plein, la présidence de la
commission sur l'avenir des retraites penche plutôt en faveur de la seconde
option, plus dans l'air du temps et en phase avec les orientations déjà avancées
par le gouvernement.
Hausse des charges patronales
Pour augmenter les recettes, le rapport propose également une hausse de 0,3%
de la cotisation patronale déplafonnée, qui augmenterait ainsi de 1,6% à 1,9%.
De quoi faire bondir le Medef… Les employés, pour leur part, pourraient subir
une sous-indexation de leurs salaires (portés au compte) pour le calcul de leur
retraite. Un exemple, pour bien comprendre ce mécanisme: ils cotiseraient 100
euros mais ne généreraient que 95 euros de droits à la retraite. Un mécanisme
déjà en place dans les régimes complémentaires des salariés et des cadres Agirc
et Arrco…
Sur le long terme, le pilotage du régime pourrait être réalisé via cette
sous-indexation, comme c'est déjà le cas pour les retraites complémentaires des
salariés et des cadres Agirc et Arrco. Le Conseil d'orientation des retraites
proposerait par exemple en période de crise de sous-indexer davantage les
salaires portés au compte, et le gouvernement trancherait.
Modifier le calcul des retraites des fonctionnaires
Le rapport s'attaque aussi aux inégalités entre salariés du privé et
fonctionnaires. Il propose que les pensions de ces derniers soient calculées sur
les traitements (leur salaire) des 10 dernières années, et non plus des six
derniers mois. En échange, les primes, qui représentent une grande partie de la
rémunération des fonctionnaires de certains ministères (jusqu'à la moitié pour
certains agents de l'Économie), seraient mieux prises en compte dans le calcul.
De quoi faire hurler, là, les syndicats de fonctionnaires…
Au sujet de la pénibilité, sujet cher au gouvernement, le rapport Moreau
propose deux solutions: mettre en place des congés de fin de carrière ou un
système d'acquisition de suppléments de retraite. À noter, le rapport
retiendrait deux types seulement de situation de travail pénible: le travail de
nuit et l'exposition à des substances cancérigènes.
Enfin, pour réduire les inégalités homme femme, le rapport Moreau préconise
de réformer les avantages familiaux liés au nombre d'enfants. Ce système,
proportionnel au niveau de la pension, favorise en effet plus les hommes que les
femmes. Un comble alors que ce sont ces dernières qui arrêtent de travailler le
plus souvent pour s'occuper de leurs enfants. Le rapport propose donc la
forfaitisation de ce système.
Ce rapport fera office de boîte à outils dans laquelle le gouvernement
piochera les mesures qui lui semblent les plus opportunes, et aussi
politiquement acceptables, à prendre.
Le rapport Moreau sur l'avenir des retraites ne sera rendu au gouvernement
que vendredi 14 juin, mais déjà, les spéculations vont bon train sur le contenu
de la réforme qui sera présentée à la fin de l'été. Parmi les pistes évoquées,
la question de la retraite des fonctionnaires promet d'être au centre des
débats. Dans un communiqué commun, six organisations syndicales de la fonction
publique menacent déjà d'organiser des journées d'action à la
rentrée.
Sur le papier, les agents de la fonction publique bénéficient d'un système de
retraite plus favorable que les salariés du privé. Mais sont-ils vraiment si
privilégiés ?
Un mode de calcul des pensions plutôt avantageux
La règle des "six derniers mois". C'est la principale
différence entre le système de retraite du privé et du public. La pension d'un
fonctionnaire est calculée à partir du salaire touché six mois avant le départ
en retraite. Le fonctionnaire touchera alors 75% de son ancien salaire. Tandis
que la retraite d'un salarié du privé est déterminée sur la base des salaires
touchés pendant les vingt-cinq meilleures années de sa carrière, ce qui est bien
moins favorable. Ce salarié touchera 50% de son salaire moyen, ainsi que sa
retraite complémentaire.
"Les régimes de retraite publics sont les plus coûteux, ce sont aussi
ceux qui ont repoussé les réformes indispensables", critique le think tank
libéral Ifrap, cité par Les Echos, dans un rapport qui préconise l'alignement par
étapes du mode de calcul du public sur celui du privé.
Sans aller jusqu'à vingt-cinq ans, le rapport Moreau évoque la prise en
compte d'une période de trois à dix ans. Ce qui se traduirait par une baisse
plus ou moins importante des pensions de retraite, comme l'a calculé la CGT. Un fonctionnaire de catégorie B
rémunéré 2 273 euros brut en fin de carrière qui partirait demain à la retraite
toucherait une pension de 1 705 euros par mois. Si la période de référence passe
de six mois à dix ans, sa pension ne serait plus que de 1 568 euros, selon le
syndicat, soit un manque à gagner de 8%.
Plusieurs raisons expliquent toutefois cette différence d'approche entre
"derniers mois" et "meilleures années". Les primes touchées par les
fonctionnaires, qui peuvent représenter une part non négligeable de leurs
rémunérations (surtout pour ceux de la catégorie A, la plus élevée) ne sont pas
prises en compte pour le calcul des droits à la retraite, alors qu'elles le sont
dans le privé. Autre explication avancée : les carrières de fonctionnaires sont
souvent très linéaires et les évolutions salariales sont modestes. Les salariés
du privé, eux, peuvent connaître au cours de leur carrière des variations de
revenus (à la hausse ou à la baisse) plus importantes, voire des périodes de
chômage, y compris chez les seniors.
Les familles nombreuses légèrement mieux loties. Les
retraités qui ont eu trois enfants bénéficient d'une majoration de 10% de leur
retraite, qu'ils aient travaillé dans le public ou dans le privé. En revanche,
les fonctionnaires sont les seuls à avoir droit à une majoration supplémentaire
de 5% par enfant à partir du quatrième enfant.
Un traitement particulier pour les policiers, pompiers, surveillants
de prison, éboueurs... On les appelle les "catégories actives" de la
fonction publique car leurs professions présentent "un risque particulier ou
des fatigues exceptionnelles". Certaines de ces professions ouvrent un droit à la retraite dès 57 ans,
d'autres dès 52 ans (mais pas forcément avec une pension à taux plein).
Les avantages des fonctionnaires s'amenuisent
Des avantages régulièrement grignotés. Les avantages de la
fonction publique en ce qui concerne la retraite ne sont plus aussi importants
qu'autrefois. En effet, plusieurs réformes sont déjà passées par là. Celle de
2003 a par exemple aligné la durée de cotisation du secteur public sur celle du
privé (40 ans contre 37,5 ans auparavant, puis 42 ans pour tout le monde après
la réforme de 2010). La réforme de 2010 a, quant à elle, mis fin à un dispositif
qui permettait aux fonctionnaires parents de trois enfants de partir à la
retraite après quinze ans de service.
Des trimestres plus difficiles à valider que dans le privé.
Pour valider un trimestre dans le public, c'est la durée effective du travail
qui est prise en compte : un fonctionnaire doit ainsi travailler au moins 45
jours sur 90. Dans le privé, il est plus aisé de valider un trimestre : pour ce
faire, il suffit d'avoir touché 200 fois le smic horaire. Soit 1 886 euros
bruts, même si le salarié n'a travaillé qu'un mois au lieu de trois.
Les fonctionnaires pas tous logés à la même enseigne. Pour
justifier la fin du système dérogatoire en vigueur dans le public, le niveau des
salaires, légèrement plus élevé que dans le privé, est souvent mis en avant. En
effet, en 2010, un fonctionnaire d'Etat gagnait en moyenne 2 459 euros par mois,
contre 2 082 euros pour un salarié du privé (voir page 167 du rapport
annuel 2012 sur l'état de la fonction publique). Mais un agent de la
fonction publique hospitalière ne gagnait que 2 205 euros. Enfin, pour les
agents de la fonction publique territoriale, les plus mal lotis, le salaire
moyen n'était que de 1 800 euros, soit moins que dans le privé.
Un point d'indice gelé depuis 2010. Aux disparités de
rémunérations est venu s'ajouter, depuis le 1er juillet 2010, le gel du point
d'indice des fonctionnaires, décidé par le gouvernement Fillon et confirmé par
l'équipe Ayrault. Résultat : les salaires stagnent alors que l'inflation
progresse.
Dans les faits, les pensions de retraite sont comparables
Entre public et privé, les modalités pour calculer les droits à la retraite
sont complètement différents. Mais si l'on observe les pensions effectivement
versées aux anciens salariés du public et du privé, force est de constater que
leur niveau respectif est tout à fait comparable. Selon une étude du Conseil
d'orientation des retraites (COR), relayée par Les Echos, le niveau de la pension n'est pas tant
déterminé par le statut que par le montant du revenu du salarié partant à la
retraite.
Ainsi, un cadre du secteur privé touchant 7 400 euros brut par mois en fin de
carrière aura droit à une retraite équivalant à 56% de son salaire. A revenu
équivalent, le taux de remplacement d'un haut-fonctionnaire sera très proche
(54%). L'observation vaut aussi pour les non-cadres : un salarié du privé
gagnant 2 500 euros en fin de carrière touchera 75% de son salaire. Un policier
ou un enseignant bénéficiera du même taux de remplacement.
L'argument est repris par les syndicats. "L'étude du COR montre bien que
cette question est un faux débat qui va servir une fois de plus à opposer les
salariés du public et du privé", s'insurge Christian Grolier, secrétaire
général FO-Fonctionnaires, interrogé par francetv info. La prochaine conférence
sociale, organisée par le gouvernement les 20 et 21 juin, s'annonce
mouvementée.
Le gouvernement a entamé ce jeudi les consultations sur les
retraites des fonctionnaires. Elles sont souvent présentées comme plus
avantageuses que celles du secteur privé. Vrai ou faux? Voici les spécificités
du régime des retraites de la fonction publique.
Depuis la réforme Fillon de 2003, les règles d'âge et de durée de cotisation
du secteur privé s'appliquent aussi aux fonctionnaires. Mais le régime des
retraites de la fonction publique conserve de nombreuses spécificités. Etat des
lieux.
Un taux de cotisation plus faible
Alors que les employés du privé reversent 10,55% de leur salaire brut au
régime des retraites, le taux de cotisation des fonctionnaires n'est que de
7,85%. En revanche, l'Etat employeur cotise à hauteur de 55,7% (personnels
civils) et de 103,5% (militaires) alors que le taux est de 15,6% dans le
privé.
Un âge de départ à 60 ans, sauf nombreuses
exceptions
La durée de cotisation requise pour une retraite à taux plein est, comme dans
le privé, de 40,5 ans. Par ailleurs, l'âge légal de départ est aussi à 60 ans.
Sauf pour les fonctionnaires mères d'au moins trois enfants : il n'y a pas de
condition d'âge minimum pour elles. Une sur six bénéficie de cette mesure, à un
âge moyen de 51 ans. Sauf également pour les fonctionnaires ayant effectué au
moins 15 ans de "service actif" (emplois présentant "un risque particulier ou
des fatigues exceptionnelles", comme les infirmières, agents des Douanes, de
l'Equipement, de La Poste et de France Télécom, les éducateurs de la protection
judiciaire de la jeunesse, etc...) : ils peuvent partir à la retraite dès 55
ans. Sauf aussi pour les fonctionnaires en "service actif" de certains corps de
métiers (policiers, surveillants pénitentiaires, contrôleurs aériens...) : ils
bénéficient tous les cinq ans d'une année de droits à la retraite à titre
gratuit et peuvent partir dès 50 ans. Un policier part en moyenne en retraite à
53 an.
La retraite des fonctionnaires en
chiffres
La fonction publique, qui emploie 5,2 millions d'agents, comptait
3,173 millions de retraités en 2008. L'âge moyen de départ à la
retraite est de 58 ans et 8 mois pour les fonctionnaires de l'Etat (43 ans et 8
mois pour les militaires) et agents territoriaux, de 56 ans et 2 mois pour la
Fonction publique hospitalière.
Le montant moyen brut des pensions est de 1191 euros dans la Fonction
publique territoriale, de 1265 euros dans l'hospitalière et de 1952 euros pour
les pensions civiles de la fonction publique d'Etat. Le montant des retraites
des agents de l'Etat représente 34 milliards d'euros du budget
en 2010, selon le gouvernement, soit près de 15% du budget
général.
Une pension calculée différemment,
pas forcément plus élevée
Alors que la pension des salariés du privé est calculée sur la base de 50% de
la moyenne des 25 meilleures années de la carrière, celle des fonctionnaires
équivaut à 75% des six derniers mois de traitement. Mais à la différence du
privé, les primes et les heures supplémentaires ne sont pas prises en compte
dans le calcul de la retraite. Or, elles représentent en moyenne 20 % de la
rémunération des agents. En outre, jusqu'en 2005, les fonctionnaires ne
bénéficiaient pas d'une retraite complémentaire. Selon Henri Sterdyniak,
économiste à l'OFCE, au final, les niveaux des pensions en pourcentage du
dernier salaire "ne sont pas très différents" entre le public et le privé.
"Un fonctionnaire né en 1948, dont la prime représente 40% du salaire,
touchera une pension équivalente à environ 59% de son dernier traitement,
explique-t-il dans Les Echos. Un cadre du privé né la même année, qui
termine sa carrière à deux fois le plafond de la Sécurité sociale (5.800 euros
par mois), touchera 60%."
Des pensions de
réversion plus faibles
Les veuves et veufs de fonctionnaires bénéficient de pensions de réversion de
50% de la retraite du conjoint décédé, contre 54% dans le privé. Mais cette
pension est versée sans conditions de ressources ni d'âge, contrairement au
privé, où un plafond est instauré et où il faut avoir au moins 55
ans.